Un tournant judiciaire majeur s’annonce en République démocratique du Congo. La justice militaire a officiellement saisi le Sénat pour obtenir la levée de l’immunité parlementaire de Joseph Kabila, ancien président de la République et sénateur à vie. Ce dernier est soupçonné de collusion avec l’Alliance Fleuve Congo (AFC), branche politique du mouvement rebelle M23, actif dans l’est du pays.
Les accusations sont lourdes : trahison, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et participation à un mouvement insurrectionnel. Selon les autorités judiciaires, les faits reprochés sont postérieurs au mandat présidentiel de Kabila et relèveraient de son implication présumée dans les violences armées qui ensanglantent l’Est de la RDC.
« La justice a réuni un faisceau de preuves tangibles et irréfutables démontrant l’implication directe du sénateur à vie Joseph Kabila Kabange dans des exactions commises contre des civils et des militaires dans la partie orientale du pays », a déclaré le ministre de la Justice, Constant Mutamba, lors d’une conférence de presse tenue ce mercredi 30 avril. Il a lancé un appel à l’ancien chef de l’État pour qu’il réponde devant la justice congolaise.
En cas de feu vert du Sénat actuellement dominé par la majorité présidentielle la justice pourra engager des poursuites formelles, mais aussi geler les avoirs de l’ex-président. « Tous les biens mobiliers et immobiliers de M. Kabila, situés tant en RDC qu’à l’étranger, ont été recensés. Leur saisie préventive est conditionnée à l’autorisation du Sénat », a précisé le garde des Sceaux.
Le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), formation fondée par Kabila et suspendue récemment par le gouvernement, dénonce ce qu’il qualifie de « machination politique » et de « tentative de diabolisation ». Depuis plusieurs semaines, ses cadres évoquent des accusations infondées visant à écarter l’ancien président de l’échiquier politique.
Cette affaire intervient dans un contexte délicat, alors que des efforts de médiation régionale sont en cours pour résoudre la crise du M23 et que des voix s’élèvent pour privilégier l’apaisement politique. Le Sénat est désormais au cœur d’un dilemme : préserver l’équilibre institutionnel ou accompagner une justice qui entend marquer un tournant inédit dans l’histoire du pays.
Patrick Kalume
RDC : Joseph Kabila visé par la justice militaire, tout son patrimoine en voie de confiscation
