L’ancien président congolais Joseph Kabila Kabange a effectué une visite remarquée au centre de formation idéologique du mouvement rebelle M23/AFC à Rumangabo, dans le territoire de Rutshuru, au nord de la ville de Goma. L’information est rapportée par plusieurs sources locales et proches de l’ex chef de l’État.
Cette démarche suscite de nombreuses interrogations dans un contexte sécuritaire particulièrement tendu à l’Est de la République démocratique du Congo.
Selon une source proche, cette visite visait à « s’imprégner des conditions dans lesquelles les compatriotes ayant rejoint la révolution sont formés sur les plans idéologique et militaire ». Joseph Kabila, qui a dirigé le pays de 2001 à 2019, conserve une influence notable au sein de l’armée et des cercles sécuritaires. Son passé de commandant suprême des FARDC et de la police nationale semble lui conférer une légitimité à s’impliquer dans ce dossier explosif, même sans adhésion formelle au mouvement.
Des réunions de haut niveau auraient été tenues sur place avec des responsables de la branche armée du M23/AFC, autour d’un état des lieux de la crise dans l’Est et d’une série de propositions de sortie de crise, regroupées autour de ce que la même source décrit comme « une vision globale en 12 pistes de solutions ».
La visite intervient alors que le M23 continue de gagner du terrain dans plusieurs zones de la province du Nord-Kivu, en dépit des efforts diplomatiques et militaires du gouvernement central et de ses partenaires internationaux pour contenir la rébellion.
Si certains observateurs y voient une tentative de médiation de la part de l’ancien président, d’autres s’interrogent sur les véritables motivations de cette initiative. En effet, l’implication directe de Joseph Kabila dans un conflit armé où les responsabilités sont fortement débattues, notamment au sujet du soutien présumé du Rwanda au M23, pourrait fragiliser davantage le paysage politique congolais.
Interrogé par Radio France Internationale (RFI), le Secrétaire permanent du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), Emmanuel Ramazani Shadary, a tenu à clarifier la posture de Kabila. « L’ancien président est à Goma dans une démarche de paix, au même titre que les leaders religieux de la CENCO et de l’ECC. Il reste l’un des acteurs politiques majeurs de notre pays, qui connaît parfaitement les enjeux actuels », a-t-il affirmé.
Alors que la région de l’Est reste en proie à une instabilité chronique depuis plus de deux décennies, le rôle que pourrait jouer Joseph Kabila dans une éventuelle médiation divise. Certains analystes y voient une manœuvre stratégique en vue d’un retour sur le devant de la scène politique nationale. D’autres estiment qu’il pourrait, grâce à son expérience et ses réseaux, contribuer à ouvrir de nouvelles pistes de dialogue.
Quoi qu’il en soit, cette visite à Rumangabo intervient à un moment critique. Elle pourrait marquer un tournant dans la gestion de la crise congolaise, ou, à l’inverse, ajouter à la complexité d’un conflit déjà multidimensionnel.
Muller Mundeke depuis Beni