Le président rwandais Paul Kagame a été reçu ce mercredi matin à l’Élysée par Emmanuel Macron, lors d’une visite discrète mais politiquement stratégique. Au cœur des discussions : les tensions croissantes dans la région des Grands Lacs, la coopération bilatérale entre Paris et Kigali, et un projet mémoriel majeur consacré au génocide des Tutsis.
Sans avoir été annoncée à l’agenda officiel de l’Élysée, cette rencontre matinale a marqué le début d’une journée diplomatique dense pour le président français. Après Kagame, Macron a enchaîné avec des entretiens avec le chancelier allemand Friedrich Merz et le président par intérim syrien Ahmed al-Charaa.
Selon des informations obtenues par RFI, la situation sécuritaire à l’est de la République démocratique du Congo a occupé une place centrale dans les échanges entre les deux chefs d’État. La France, membre du « groupe de contact » chargé du suivi des efforts de paix dans la région, tente de jouer les médiateurs entre Kigali et Kinshasa dans un contexte de forte tension.
Paris multiplie les initiatives diplomatiques pour appuyer le processus de désescalade, que ce soit au sein du Conseil de sécurité de l’ONU, dans les cercles européens ou à travers des canaux bilatéraux. Le président Macron s’est montré soucieux de renforcer le rôle de la diplomatie française dans cette région instable, tout en maintenant le dialogue avec les acteurs clés.
Sur le plan bilatéral, les relations entre la France et le Rwanda poursuivent leur lente normalisation, amorcée ces dernières années. Un symbole fort de ce rapprochement est la création prochaine à Paris d’un **mémorial consacré au génocide des Tutsis de 1994**, en partenariat avec les autorités rwandaises.
Le projet, désormais en phase finale de préparation, devrait être officiellement présenté dans les prochains mois. Il témoigne de la volonté commune de reconnaître les responsabilités historiques, tout en posant les bases d’un avenir apaisé entre les deux nations.
La visite de Paul Kagame à Paris ne s’est pas arrêtée aux couloirs feutrés de l’Élysée. Dans la soirée, le président rwandais devait assister au Parc des Princes à la demi-finale de la Ligue des champions entre le PSG et Arsenal – deux clubs partenaires de la campagne touristique « Visit Rwanda », lancée en 2018.
Si ce sponsoring accroît la visibilité du pays sur la scène internationale, il suscite également des critiques. Des supporters du PSG dénoncent une opération de « sportwashing » visant à masquer les atteintes aux droits humains au Rwanda. Une pétition intitulée « Stop au partenariat de la honte », lancée en janvier, avait franchi ce mercredi la barre des 75 000 signatures. Arsenal, de son côté, a récemment renouvelé son partenariat avec Kigali, malgré la controverse.
En quelques années, le Rwanda s’est imposé comme un acteur majeur du marketing sportif en Europe, sponsorisant également le Bayern Munich et, tout récemment, l’Atlético de Madrid.
Cette visite discrète mais lourde de sens confirme l’ambivalence des relations entre Paris et Kigali : entre mémoire, diplomatie régionale et enjeux d’image, la coopération entre les deux pays avance sur un fil tendu, entre reconnaissance historique et intérêts stratégiques. Emmanuel Macron et Paul Kagame, malgré leurs différends passés, semblent déterminés à maintenir un canal de dialogue direct, au service d’une influence française renouvelée en Afrique centrale.
Patrick Kalume
Rwanda-France : Paul Kagame reçu par Emmanuel Macron à Paris ce 7 mai
